Aux portes du Meygal, aux Balayes, proche de la commune de Champclause, le lac Bleu est probablement la curiosité à ne pas manquer. Tout simplement parce que ce petit lac est unique en son genre ! Laissez-vous gagner, à la manière d’un enfant, par l’émerveillement provoqué par sa couleur si particulière que lui confère les lauzes, une pierre plus épaisse que l’ardoise plus proprement appelée phonolite, qui tapissent le fond.
Ses eaux, en principe très froides, sont peuplées de poissons qu’il ne faut surtout pas déranger. Ainsi la contemplation est le seul plaisir autorisé de ce petit coin intimiste à l’atmosphère feutrée qui, été comme hiver, mérite un petit détour.
Le fruit du travail des lauzerons
Les huit mètres de profondeur du lac Bleu ont été creusés au XXe siècle à la force des bras de vaillants lauzerons, métier de ceux qui extrayaient et taillaient la lauze. De creuser, ces travailleurs, dont il reste aujourd’hui quelques rarissimes spécimens, firent jaillir une source. Et grâce à une ingénieuse tranchée et au moyen de chêneaux de bois, ils parvinrent à détourner l’eau de la source et à siphonner l’eau du fond afin de continuer l’exploitation. Les lauzes extraites servaient à recouvrir les toitures. Les toits de lauze présentaient des avantages très appréciés par les habitants des hauts-plateaux, tels que sa résistance aux intempéries et aux basses températures.
« Qui pose lauze, pour 100 ans la pose »
Un autre avantage du toit de lauze et pas des moindre : sa longévité. Comme le dit le dicton « Qui pose un toit de lauze, pour 100 ans la pose ». C’est pour cette raison qu’il n’est pas rare de trouver encore de nombreuses habitations couvertes de lauze sur le territoire Mézenc-Loire-Meygal. Un toit qui, si bien entretenu, confère à ces demeures un authentique cachet, et dessine un mariage bucolique entre paysage et civilisation. Adrien Eyraud, un des derniers lauzeurs de la commune des Estables allait même plus loin : “bien attaché sur une bonne charpente, un toit de lauze peut durer 500 ans, mais pas n’importe quelle lauze ; celle de Chaudeyrolles se décompose rapidement, celle de Chaulet éclate et est irrégulière ; la meilleure, c’est celle des Balaye, près du Lac Bleu ; elle est régulière et d’une résistance à toute épreuve.”
Néanmoins, le toit de lauze présente quelques particularités qui rendent son installation et son entretien complexe. C’est une pierre lourde et exigeante, difficilement manipulable et dont la pose nécessite un véritable savoir-faire, puisqu’un toit de lauze peut peser jusqu’à 500 kg au m² selon l’épaisseur de la lauze.
Qu’en est t’il du savoir-faire ?
À ce jour, les besoins en lauzes sont largement couverts par l’utilisation de lauzes de récupération. Ainsi, plus aucune carrière de lauze, ou lauzières, n’est en activité. Les nouvelles lauzes sont brutes, il faut les travailler. Tandis que les anciennes représentent un gain de temps car elles sont déjà taillées. Entre 2006 et 2020, seulement deux toits de lauzes ont été réalisés avec les lauzes extraites par Jean-Marc Pélissier, le dernier des lauzerons de Haute-Loire, aujourd’hui à la retraite. Les lauzes extraites ont principalement servi pour du dallage ou autres petits travaux.
L’arrêt de l’exploitation de la carrière de Champclause a permis à l’eau de reprendre ses droits et ainsi remplir ce qui était autrefois une carrière de lauze, et ce qui est finalement aujourd'hui un joyau naturel façonné par l’homme.
Une petite virée « Autour du lac Bleu »
Aller jusqu’au lac Bleu conviendra aux adeptes des petites promenades. Mais les plus gros marcheurs resteront sur leur faim ! Au départ du parking, traversez la route pour trouver en face un large chemin. Empruntez-le et suivez le balisage jaune du PR n°475. Il vous fera faire une boucle de 8km. Une balade à priori facile d’environ deux heures au cours de laquelle vous pourrez notamment traverser le village de Montvert et ses nombreux vestiges : son lavoir, son assemblée au toit de lauzes, son abreuvoir et son four à pain. Autant d’éléments marqueurs forts d’un passé et d’un mode de vie propre à ce petit hameau.
Accès: depuis Saint-Julien-Chapteuil, ralentissez lorsque vous arrivez au village des Balayes. Un tout petit panneau, à proximité d’une bâtisse clôturée d’un muret de lauzes, vous indiquera de tourner à gauche toute (ou à droite si vous arrivez depuis Saint-Agrève) ! Le lac Bleu est facilement accessible. Roulez 350 mètres jusqu’au parking. Finissez à pied par la voie montante. Elle vous mènera au lac. Marchez environ 300 mètres, et par une entrée naturelle vous pénétrerez enfin dans ce théâtre de lauze.
Attention, vous ne pouvez pas vous y baigner (même si c'est tentant)